Hologramme

Publié le par Domiji

Joséphine Wall

 Lorsque nous rêvons notre conscience est projetée dans une sphère où tous les personnages sont sécrétés de notre imagination selon l'impact que ces individus ont dans notre vie dite "réelle". Les multiples situations qui s'y déroulent et toute l'atmosphère qui s'en dégage reflètent notre état d'âme du moment. Souvent, du fait que le mental soit écarté, l'absence de censure permet de mettre en scène des situations explosives, ou nous donnant l'occasion de vivre ce qu'on s'interdit en mode diurne. Les rêves sont souvent révélateurs des problèmes physiologiques, psychologiques ou des peurs sous-jacentes. Parfois des clefs sont données, sous la forme de symboles ou d'archétypes, permettant de résoudre certaines difficultés se présentant dans la vie de la personne. D'autres fois, un cauchemar sera le moyen de prendre conscience de notre enlisement ou de notre crispation sur des nœuds émotionnels. Il peut également mettre en scène nos plus intimes frayeur afin de les exorciser.

Et puis il y a les songes qui mettent en lumière notre degré d'ouverture, notre connexion avec la Source, notre communion avec l'essentiel, ou mieux encore, notre unité avec la vie. Cependant cela aussi reste un rêve, certes épuré de toutes les ombres du quotidien et délesté des empreintes karmiques qui conditionnent et délimitent la personne. 

Pourtant, du cauchemar le plus glauque au songe le plus idyllique, nous ne faisons que traverser ces sphères d'énergie holographique, bien qu'imprégnantes. Assurément, nous sommes là où est notre intention, notre attraction, notre répulsion, notre aspiration et notre inspiration. Regardons-les comme autant de facettes du miroir nous renvoyant  à nous même... Tout fait signe et nous parle de nous. Tout est le Un se rappelant son Unité dans le fractionnement de sa diversité apparente.

Il arrive qu'en plein rêve on puisse prendre conscience que nous sommes en train de rêver. Cette sorte d'éveil dans le songe, ou durant le cauchemar, ouvre la possibilité de voir l'illusion de la scène en train de se dérouler. Soit on se réveille (on s'éjecte de la sphère onirique), soit le rêve se poursuit mais en prenant une coloration nouvelle, plus fluide, plus éclairée, plus inspirante. Il peut même se manifester ce que nous appelons "l'Eveil" où tout le clair-obscur des formes mouvantes se fondent dans l'uniformité lumineuse de L'Immobile Silence illimité...

Et bien, ce qui se passe dans la journée, dans notre état dit de veille, est aussi un rêve (et parfois un véritable cauchemar) dont on peut se réveiller. Absolument toute la trame de ce que nous croyons être une journée quotidienne est un espace holographique peuplé de toutes nos croyances, nos manques, nos peurs, et parsemé ici ou là d'éclairs de lucidité, de joie, de paix, de beauté ou de facéties de la vie miroitant  notre ouverture sur l'indicible... chacun se promène dans son propre monde, une projection de notre état intérieur, tout nous renvoie à nos mémoires et/ou notre transparence, mais beau ou laid, bon ou mauvais, ce n'est qu'un film qui se déroule sur l'écran de la conscience. L'état d'unité est neutre.

 Exactement comme dans le rêve nocturne, ils s'y incrustent des symboles, des pistes comme autant de signes qu'on s'adresserait à soi-même pour s'enseigner et se sortir de cet engourdissement hypnotique. Il arrive que ce soit de véritables secousses, voire des séismes qui viennent tout ébranler pour nous réveiller de notre léthargie. Mais il se peut aussi qu'il se présente comme un flottement faisant s'évanouir les frontières qui en d'estompant nous immerge doucement dans la délicieuse unité de la vie.

Et cela aussi est un bouleversement.

Ainsi, au cours de la journée, lorsqu'on réalise  qu'on est entrain de rêver, quand cette prise de conscience ce fait de tout son être, quelque chose se produit qui peut aller du simple décollement de la scène en train de se manifester à une véritable béance sur Ce Qui Est, voire à l'Eveil pur et simple.

Il est intéressant de le faire aussi quand tout va bien. Car même lorsque tout nous sourit, on est en train de rêver d'être un individu séparé qui a une belle vie! on peut même se fourvoyer en se croyant éveillé parce que tout roule! Avouons que c'est nettement plus difficile d'aspirer à l'Eveil dans ce ronronnement et qu'il est parfois nécessaire de sortir de sa zone de confort pour se toucher d'Infini. Rappelons-nous que l'Eveil n'a rien à voir avec une satisfaction personnelle, ou une réussite personnelle. L'Eveil est justement de voir l'impersonnalité et l'unité de la vie.

Le plus souvent il y aura comme une décoloration de la scène en cours, une sorte de détente, une fluidité s'installera remplaçant ce qui l'instant d'avant paraissait si lourd, compliqué et compacte. La trame du tissu s'aère, une légèreté d'installe, tout devient moins consistant, moins réel, l'emprise se relâche. On ne se prend plus au sérieux. On est au cinéma observant le déroulement d'un film tragi-comique... Il n'y a plus alors qu'un immense regard embrassant tout.

Il peut aussi arriver que quelque chose d'insolite, voire de désopilant,  se manifeste là où on s'y attendait le moins, dès qu'il y a retour au Soi et que l'UN est vu en tout, une brèche  s'ouvre dans laquelle s'engouffre la lumière joyeuse et joueuse de la vie-une donnant un éclairage nouveau sur ce qui se produit. Il sera alors perçu l'aspect purement onirique de ce qui semble être vécu. L'attraction se défait et le rêve s'efface. Cela peut être absolument vertigineux. Là, à l'instant, dans une hyper lucidité, il y a connaissance que tout ce qui est vu n'est qu'un rêve qui passe dans le vide d'où tout émerge et retourne. La bulle éclate, reste le Rien... d'où tout apparaît! 

Comme au sortir d'un rêve au petit matin, reprenant conscience de notre présence dans notre lit et savourant le fait que "ah bon! ce n'était qu'un rêve!",

 s'éveiller en pleine journée donne l'impression qu'en vérité,

il ne s'est jamais rien passé...

Domiji

 

 

 

 

 

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