Que de l'Amour
Nous nous sommes enroulés dans ce manteau de chair, nous l'avons éclairé de quelques couleurs de l'arc en ciel, nous l'avons noué de mille fils nuancés qui tissaient une histoire... puis nous nous sommes figés dedans comme le sel s'encroûte en sortant de l'eau. Comme l'eau se cristallise dans un univers glacé. Comme la terre se dessèche sans l'eau qui vient l'abreuver.
Mais au fond de notre cœur, nous savons que nous sommes l'Amour.
Il y a cette nostalgie qui affleure l'âme si souvent. Il y a cette buée heureuse qui remplie notre regard face à un acte de compassion, de solidarité. Il y a ce frémissement émerveillé devant la beauté, sous quelque forme qu'elle nous apparaisse.
C'est parfois comme un souvenir lointain, une trace de lumière, une fragrance de béatitude qui resurgit comme émergée du cœur de notre cœur. Une envie d'aimer et d'embrasser le monde entier.
Quelque chose s'ouvre, quelque chose cède, et cet Espace amoureux semble répandre son infinité, sa douceur silencieuse, sa joie profonde. Sa sérénité. Il ne s'agit pas d'émotion, mais de cette intensité de l'Être se vivant en Amour Parfait.
Nous le savons que nous sommes que de l'Amour. Mais replié sur ce petit moi, nous avons oublié que pour en diffuser le parfum il était bon de s'ouvrir comme la fleur à la rosée du matin.
Nous avons oublié et pourtant Cela se parle dans le silence de deux amis en communion de vie, en communion de foi, en "re-co-naissance" d'Être dans une intensité radieuse. Hors toute compétition, hors toute comparaison. Cela qui Est se révèle dans son immensité joyeuse. On pourrait dire que l'un envoie sa shakti à l'autre. Ce n'est pas ainsi, les portes des deux sont ouvertes sur l'Un et L'Amour se rejoint et fusionne par cette béance. Les deux vagues déferlent l'une en l'autre et se retrouve océan. La digue du moi s'est rompue et il est vécu un instant d’Éternité en ces âmes embrassées. Et je ne parle pas ici de sexualité, mais de la simple absence du moi qui fait que l'Être que nous sommes se retrouve dans la totalité de son amoureuse présence. Cette intimité précieuse et ensoleillée s'éprouve sans se toucher. Et pourtant ce touché du cœur est plus palpable que bien des corps enlacés.
Voilà ce qu'est l'Amour. Ce n'est pas une bataille d'ego pour avoir le pouvoir sur l'autre et le posséder. C'est se reconnaître en l'autre, se vivre en l'autre. Non pas dans sa personnalité, mais dans son intime... immensité. Cette Unité révélée frissonne du bonheur de l'Êtreté.
Et puis laissez l'autre s'exprimer dans son apparente différence, parce que tel qu'il est c'est ainsi que Dieu se revêt.
Nous le sentons, Cela frémit en nous, et parfois cela jaillit par dessus nous, à travers même les plus grandes crispations personnelles, tant sa force d'aimer dépasse tous les enfermements, tant sa puissance d'aimer est un bouleversement.
Nous ne sommes Que de l'Amour. Et c'est pour cela que nous nous sentons terriblement blessés quand nous ne pouvons pas l'exprimer. Nous nous manquons. Tout notre vie n'est qu'un rendez-vous amoureux... avec nous-même. Combien en manquons-nous ?
Quand nous laissons l'essence de l'Être répandre sa ténacité aimante dans sa joyeuse effervescence, toutes les fragmentations du moi sont effacées. La guérison s'opère, les fractures sont ressoudées. L'Amour va aller dissoudre tout se qui nous sépare de notre intégrité. L'opacité de la personne est éclairée, parfois transfigurée, les portes et les fenêtres sont grandes ouvertes et le Soleil du Soi va aller se rayonner , se refléter, se toucher et s'embrasser dans tout Ce Qui Est.
Domiji